mardi, février 28, 2017

Mélenchon, le candidat à la présidentielle pour qui il était trop tard.

Suite à une entrevue avec B. Hamon le 24 février, J-L Mélenchon a proposé un curieux argument pour justifier son choix de maintenir sa candidature sans même essayer de négocier une candidature commune. « Il est trop tard ! » a-t-il affirmé.


   Mais Jean-Luc, on a toujours le temps ! On n’a même que ça ! Exister, n’est-ce pas essentiellement cela : avoir du temps ?

   La restriction, et elle est importante, c’est le temps qu’il faut incontournablement affecter à l’entretien de sa vie (dormir, manger, etc.). Mais, avec le niveau de moyens techniques en lequel vous et moi vivons en contexte de culture occidentale, reconnaissez que ce temps est considérablement réduit.

   Contrairement à nos arrière-grands-parents qui rêvaient d’être un jour riches pour cesser de trimer à gagner le pain de leur vie afin de faire des choses qui aient humainement du sens, nous sommes riches ! Nous pouvons passer la plus grande part de notre temps à faire valoir notre liberté dans le monde.

   Et vous le faites fort bien en consacrant l’essentiel de votre activité libre à l’action politique. Hannah Arendt avait raison de considérer que le domaine politique est celui où la liberté humaine peut se faire valoir pleinement parce c’est le seul où nous sommes requis de nous mettre d’accord sur les valeurs finales –  sur le Bien et le Juste –  en fonction desquelles nous voulons vivre ensemble.

   Et vous ne le faites pas à moitié puisque vous vous présentez à l’élection présidentielle. Et ce faisant vous proposez un programme qui intéresse beaucoup parce qu’il veut rompre avec le conservatisme marchand dévastateur de la vie sociale et de la biosphère en réformant profondément l’organisation de la société et les principes des rapports de l’homme à son environnement.

   Je dois vous le dire, Jean-Luc, une grande partie de la population, qui persiste à croire en la valeur de l’humanité et en son avenir, souhaite que vous accédiez au pouvoir.

   Mais pour cela il faut que vous vous accordiez avec Benoît Hamon sur un programme commun derrière une candidature commune.

   Car vous savez très bien que sur votre seul nom vous ne serez pas élu. Vous stagnez en 5ème position à 10% des intentions de vote, distancé par Hamon, et vous ne retrouvez pas cette fois l’élan qui vous avait porté, un temps, lors de la campagne présidentielle de 2012.

   Cela devrait être faisable car les buts finaux – le Bien et le Juste de la société que vous voulez promouvoir, Hamon et vous, à travers vos programmes respectifs, sont convergents. Les quelques points de désaccord devraient être aplanis en quelques jours dans une négociation entre hommes/femmes politiques de bonne volonté soucieux de l’intérêt public.

   Vous dites : « Oui, mais mon concurrent de gauche n’est pas tout-à-fait comme il faut ! ». Mais, vous le savez, personne n’est réductible à une nature, et ce sont les relations humaines positives qui font les bonnes évolutions de chacun.

   De plus, Hamon a clairement montré qu’il place la légitimité de sa candidature non pas dans sa carte du parti socialiste, mais dans la forte proportion de suffrages populaires que lui a valu sa participation à la primaire à gauche. N’avez-vous pas compris que vous devez aussi vous considérer comme bénéficiaire des voix qui se sont portées sur lui, exactement dans la mesure, qui est grande, des dispositions qui sont communes à son programme et au vôtre ?

   Mais vous dites que vous n’avez plus le temps de négocier avec lui.

   Qu’allez-vous faire de mieux pendant ce temps qui nous sépare de l’élection ? Faire campagne en laissant croire à un sursaut qui vous ferait gagner les 15% supplémentaires qui vous qualifieraient, alors que vous savez que c’est impossible … pour laisser vos électeurs au soir du 23 avril choisir entre le candidat de droite le moins pire ?

   Vous le savez Jean-Luc, le peuple – oui, toute cette population qui ne veut pas se laisser enfermer dans l’« opinion publique » parce qu’elle prétend être sujet de son histoire – le peuple donc, lui, n’a vraiment pas le temps !

   Le peuple ne veut vraiment pas attendre encore 5 ans à reculer, de plus en plus le dos au mur, devant les saccages de l’avance du marché, à la fois dans son environnement naturel et dans sa vie sociale.

   Jean-Luc, pourquoi vous êtes-vous engagé jusque-là, pourquoi avez vous pris tout ce soin à rédiger et à faire connaître un programme qui puisse donner forme à un nouvel espoir populaire, pour le laisser choir dans le ruisseau à 58 jours de l’échéance en laquelle vous vous êtes inscrit ?

   Ne vous rendez-vous pas compte que vous êtes comptable de l’espoir que vous avez suscité ?

   Jean-Luc, le peuple a tellement soif de retrouver confiance en son avenir ! Comment pourra-t-il oublier ce jour où vous avez jugé qu’il était trop tard pour que vous vous donniez les moyens d’accéder au pouvoir ?

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire